Decathlon x Iteratif : inventer de nouvelles filières de recyclage

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Le projet en résumé

Aujourd’hui, les enseignes se doivent de trouver des solutions pour recycler et traiter les produits post-consumer ramenés par leurs clients. Mais que faire d’un produit qui n’a pas encore été acheté par un client quand celui-ci a des problèmes de qualité ? Ou d’un produit d’exposition qui ne peut être remis sur le marché sans une réparation, un changement de pièce, une vérification complète ? Chez Decathlon, on cherche des solutions ! Aujourd’hui, The field vous propose de découvrir comment Julien et Olivier s’attèlent à la recyclabilité des tentes Decathlon avec Iteratif, une start-up qui n’a pas fini de faire parler d’elle.

Les grandes étapes, par Julien Huno

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Démarrage en mode client/fournisseur

On a commencé par des études de désassemblage sur des produits. Quelle est la complexité de désassemblage de tel ou tel produit ? Quelle est la potentialité de réutilisation de matière sur tel ou tel produit ? Quelles sont les règles de conception à revoir pour optimiser le désassemblage de tel autre produit ?

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Ouverture d’un site industriel

Après un an, nous nous sommes dit que ce serait bien de se lancer sur l’enjeu de l’industrie sur ce schéma. Nous avons ouvert un site industriel pour collecter un peu plus de déchets. Nous avons commencé à outiller/ automatiser certaines étapes.

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Veille technologique

Nous avons fait une veille techno en collaboration avec des industriels de solutions de tri optique. Le tri optique est utilisé chez les collecteurs textiles pour trier les textiles monomatières, mais pas à l’échelle de produits complexes comme les nôtres. Nous avons fait des tests ensemble chez ces industriels.

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Vers la création d’une filière

Demain, mon rêve : que la filière qu’on crée soit une filière standard connectée à l’éco-organisme qui est responsable aujourd’hui des produits textiles complexes en France.

« Les déchets des uns peuvent devenir les ressources des autres »

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L’interview des porteurs de projet

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Olivier Colloc
Booster transfo Circularité / fin de vie produit & recyclage |

Comment est né ce projet autour de la recyclabilité des tentes ?

Julien : Je travaille chez Decathlon depuis 15 ans. En 2019, je suis devenu ingénieur produit pour travailler sur l’impact environnemental.
Au bout d’un an d’exploration de métier, je me suis rendu compte que mon action restait limitée à faire de l’éco-conception, à améliorer un peu les produits. Pour moi, ce n’était pas suffisant, surtout sur la fin de vie des produits où il ne se passait pas grand-chose.

Quels produits en particulier ?

Julien : Chez Quechua, je bossais sur les tentes, les sacs à dos, ce qu’on appelle « la confection lourde ». Ces produits en fin de vie ne sont pas collectés par les collecteurs trieurs ou les bennes textiles qu’on a sur les parkings. La fin de vie probable des sacs à dos, des tentes tend plutôt vers l’incinération. Moi, ça me gênait.
En 2020, avec un externe qui me parlait de recyclabilité, de fin de vie, de recyclage de ces matériaux complexes, nous avons lancé une démarche qui consistait d’abord à se demander comment désassembler ces produits, comment séparer les matières entre elles, comment trouver des exutoires ?

Au début, vous pensiez « recyclage » ?

Julien : Oui, puis on a ouvert une filière d’upcycling. C’est là que j’ai rencontré Ben, qui venait de créer Iteratif.

Peux-tu nous raconter la naissance d’Itératif ?

Ben : Je suis designer de chaussures à la base. Quand mon fils est né, j’étais basé en Chine. Je travaillais pour un fabricant de chaussures taiwanais. J’ai eu envie de changer ma façon de concevoir, de produire. J’ai utilisé mes connaissances de l’industrie pour essayer de nettoyer le secteur. J’ai commencé par dessiner une chaussure circulaire avec une efficacité de plus ou moins 80 % de recyclage. Je l’ai proposée à mon associé et nous avons décidé de la montrer à différentes marques dont Simond, chez Decathlon.
Ils nous ont demandé : « Pourquoi juste des chaussures ? ». Si on pouvait recycler quelque chose d’aussi complexe qu’une paire de chaussures, peut-être pouvions-nous aussi trouver des solutions pour d’autres produits. Nous avonscommencé à analyser des tentes, des sacs à dos, en quête de solutions.

Pouvez-vous nous présenter les tentes Decathlon sur lesquelles vous travaillez ?

Olivier : Il s’agit des tentes exposées devant les magasins de mars à septembre. Après une si longue période d’exposition aux éléments et notamment aux UV et aux manipulations des clients, certains composants de la tente peuvent être dégradés et d’autres rester comme neufs.

Nous avons ainsi un gisement assez stable, massif, régulier, que nous sauvons de la poubelle ! Avec Iteratif, on va les recomposer, changer, par exemple, le double toit, récupérer des pièces détachées.

Chaque pièce reçoit ensuite un identifiant. Il va permettre de revendre le produit soit en tant que produit fini, une tente, soit en pièces détachées de seconde vie (crochets, arceaux…). Si la pièce est cassée ou déchirée, elle sera envoyée en recyclage. C’est tout le savoir-faire d’Iteratif.

Comment avez-vous développé ce projet ?

Ben : Très tôt dans l’histoire, nous nous sommes rendu compte que pour recycler autre chose qu’un tee-shirt ou une paire de jeans, il fallait savoir précisément ce qu’il y avait dedans. Nous avons commencé à construire une plateforme utilisant un product passport. À partir de là, nous avons créé un processus pour rendre ce matériel utilisable pour le système de recyclage de notre filière.

Julien : Maintenant, on collecte tous les déchets français et belges de Decathlon. On les désassemble sur un site en Haute-Savoie. En parallèle, on a une application avec laquelle nous créons la data du déchet, ce qui nous permet de composer un catalogue d’upcycling. On a quelques initiatives en interne qui démarrent. D’autres commencent avec des acteurs externes.

Peut-on imaginer une collaboration avec d’autres enseignes ?

Olivier : On pourrait devenir, via Iteratif, fournisseurs de matières. Dans le cas de l’AFM, qui a beaucoup de textile, on a tout intérêt à mettre en commun certaines choses pour savoir comment on travaille. On peut trouver des débouchés pour les uns et les autres.

La plupart se sont construits sur la vente de produits neufs mais pourraient envisager un potentiel business model sur la seconde main ou la vente de produits upcyclés. Les déchets des uns peuvent devenir les ressources des autres.

Il faut que chacun reste assez ouvert à ce qui existe à côté. Trouver et aménager ces espaces de collaboration est particulièrement intéressant pour l’ensemble des acteurs.

Comment voyez-vous la mission de Decathlon à long terme ?

Julien : Aujourd’hui, nous devons être pionniers sur ce genre de sujet car nous sommes quand même un gros groupe. Pour avoir un réel impact, c’est aux « gros » de bouger. Nous devons être pionniers sur ces démarches, nous devons

tirer le marché vers le haut, investir sur ces sujets. L’incinération par défaut de ces produits complexes ne doit pas être une norme.

Aujourd’hui, un produit upcyclé a le meilleur impact environnemental que l’on puisse avoir. On est encore sur une niche mais il faut préparer demain.

Un retour d’expérience à nous partager ?

Vous avez développé un projet, un service, un produit, en faisant appel à la collaboration ? Ça nous intéresse !

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